Fin de l’ARENH : quel impact sur les ménages ?

Publié le 15 décembre 2025
Source : RAPPEL, Décembre 2025


Avec la fin de l’ARENH, un nouveau cadre de régulation du nucléaire historique d’EDF doit entrer pleinement en vigueur en 2026 : le Versement du Nucléaire Universel (VNU).

Présenté comme un mécanisme de redistribution de la rente nucléaire, le VNU devait permettre aux ménages de bénéficier, indirectement, des revenus dégagés par EDF lorsque les prix de marché dépassent les coûts de production du parc existant. Mais les conclusions du rapport d’information présenté en octobre 2025 à l’Assemblée nationale par les députés Philippe Bolo et Maxime Laisney ainsi que les premières analyses disponibles dressent un tableau nettement moins rassurant : la redistribution n’est ni garantie, ni automatique, ni même significative au regard des règles aujourd’hui envisagées.

Aucune redistribution en 2026

Premier constat, et non des moindres : aucune redistribution n’interviendra en 2026. Selon les anticipations de la Commission de Régulation de l’Énergie, les prix de marché ne dépasseront pas suffisamment les seuils définis par l’État pour déclencher le mécanisme. Là où l’ARENH offrait une stabilité et une visibilité pour tous les consommateurs, le nouveau système est entièrement conditionnel et dépendra de paramètres de marché extrêmement volatils. Les rapporteurs Bolo et Laisney soulignent d’ailleurs que les seuils fixés sont « largement supérieurs aux coûts de production », ce qui rend l’activation du dispositif très incertaine.

Un mécanisme complexe et peu lisible

La complexité de l’ensemble et la place croissante laissée au marché sont au cœur des critiques. Le VNU repose sur des calculs techniques, des paliers de revenus et des modélisations annuelles dont la lisibilité est loin d’être acquise. Contrairement à l’ARENH, conçu comme un garde-fou structurel, le nouveau système revient à exposer davantage les consommateurs aux fluctuations du marché, sans réel filet de sécurité. Des doutes persistent également sur les modalités concrètes de redistribution, qui dépendraient en grande partie des fournisseurs, ce qui fait naître des interrogations sur la transparence et l’uniformité du dispositif.

Un mécanisme peu redistributif

D’autres éléments viennent encore réduire l’impact potentiel du VNU. Le taux de taxation des revenus excédentaires d’EDF ne serait que de 50 % dans la plupart des cas de figure, alors que le mécanisme vise précisément à capter la rente nucléaire pour la restituer aux ménages. Surtout, un projet de décret prévoit que la redistribution serait calculée uniquement sur la consommation effectuée entre le 1er avril et le 31 octobre. Autrement dit, la période hivernale, et ainsi les deux tiers de la consommation annuelle des ménages seraient exclus du calcul, alors même que ce sont les mois où les dépenses d’électricité sont les plus élevées.

L’effet concret de ces choix est spectaculaire. En se basant sur une consommation moyenne et un revenu d’EDF d’environ 80 €/MWh, la redistribution atteindrait à peine 2 euros par an pour un ménage, quand elle pourrait s’élever à plus de 60 euros si l’intégralité de la consommation et des revenus excédentaires était prise en compte. Pour une famille vivant dans une maison chauffée à l’électricité, l’écart est encore plus frappant : quelques euros d’un côté, plusieurs centaines de l’autre.

Face à ces limites, le rapport parlementaire Bolo–Laisney, comme plusieurs associations de consommateurs, appellent l’État à revoir en profondeur les paramètres du dispositif. Le VNU devait permettre de stabiliser les factures et de garantir que la rente nucléaire bénéficie réellement aux ménages. Dans sa configuration actuelle, il apparaît au contraire trop complexe, trop restrictif et potentiellement peu redistributif, au point de laisser les consommateurs plus exposés qu’avant aux aléas du marché de l’électricité.

Rédaction : Damien Barbosa, coordinateur du collectif Rénovons au réseau Cler

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